C’est la fin d’un mythe. Depuis une vingtaine d’années, le parasite Toxoplasma gondii était soupçonné de manipuler le cerveau des souris afin qu’elles aient moins peur des prédateurs, et particulièrement des chats. Les dernières études démontreraient que c’est l’ensemble des mécanismes d’inhibition et de peur des rongeurs qui serait altéré par l’infection…
Toxoplasma gondii est une espèce de parasites intracellulaires connu pour l’infection dont il est l’agent : la toxoplasmose. Très souvent bénigne, la toxoplasmose peut néanmoins se développer chez de nombreuses espèces, y compris l’humain. Sa particularité, c’est que pour engendrer une descendance, le Toxoplasma n’a pas d’autre choix que de trouver l’hôte idéal et définitif qui lui fournira les bonnes conditions de reproduction.
Objectif chat
La cible ultime du toxoplasme, son « hôte définitf », c’est le chat, et plus précisément ses intestins. Car c’est précisément là qu’il peut se reproduire en fabriquant des oocytes (ceux-là même qui, particulièrement infectieux, sont ensuite expulsés via les excréments). Pour y parvenir, le parasite utilise d’abord un « hôte intermédiaire », notamment les oiseaux et surtout les souris. Encore faut-il que ceux-ci acceptent ensuite de se laisser dévorer. Toxoplasme est donc capable d’altérer leur comportement, en transformant leur peur des chats en attirance.
Des chercheurs de l’Université de Genève (UNIGE) viennent de montrer qu’en fait c’est tout le comportement de ces hôtes intermédiaires qui est modifié : anxiété, stress, curiosité. Plus le parasite est présent sous forme de kystes dans le cerveau, plus la souris est désinhibée. Ils se sont alors demandés comment le toxoplasme parvenait à mettre en place un mécanisme aussi spécifique, à savoir l’altération exclusive de la peur des chats.
Désinhibition générale
Afin de déterminer si le changement de comportement de la souris ne concernait que sa réponse face aux félins, les chercheurs ont d’abord testé l’anxiété générale du rongeur infecté en observant son sentiment de sécurité et sa curiosité ; en les comparant avec ceux d’une souris saine ils ont immédiatement constaté une différence d’attitude chez la souris infectée, plus curieuse, moins stressée.
Puis les chercheurs ont placé des souris malades et saines en présence d’urine de lynx ; contrairement aux souris saines, les souris infectées par le parasite étaient toutes attirées par cette odeur, qui normalement les fait fuir. De même, la main de l’expérimentateur n’a fait fuir que les souris saines, tandis que les souris infectées interagissaient avec. Ils ont ensuite élargi l’expérience aux autres prédateurs de la souris, comme le rat. En plaçant un rat endormi dans la cage des souris saines, ces dernières ont tout de suite montré une réaction de panique. Au contraire, les souris infectées se sont même baladées sur le rat !
Ces expériences démontrent que contrairement aux connaissance antérieures ce n’est pas seulement la peur du chat qui est inhibée chez la souris infectée, mais bien l’ensemble de son comportement qui est altéré. Le but du parasite est avant tout que le rongeur infecté soit tué et mangé par un autre animal, quel qu’il soit !
Reste à comprendre comment le parasite effectue cette prouesse. Les biologistes sont sur la piste d’une surproduction de dopamine causée par le parasite. Le blocage chimique de ce neurotransmetteur dont la quantité augmente chez les rongeurs atteints fait en effet disparaître le comportement étrange du rat. Et un gène codant pour une enzyme proche de celle qui régule la production de dopamine a été trouvé chez Toxoplasma gondii. Mais ce ne sont encore que des indices…
Concernant l’humain, on sait que plus d’une personne sur trois dans le monde est porteuse du parasite. De quoi se poser la question de notre attirance irrépressible pour les félins domestiques. Ne serions-nous pas pilotés, tout comme le sont les souris ? A méditer.
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