On les considère parfois avec amusement, parfois avec une certaine pitié. Dans l’imaginaire social, elles sont habillées de vieilles robes de chambre tachées et entourées de nombreux chats à qui elles vouent toute leur vie.
«Elles», ce sont les folles aux chats, surnom péjoratif dont on affuble fréquemment les femmes qui choisissent d’adopter un ou plusieurs félins. Vous vous souvenez peut-être d’Eleanor Abernathy personnage récurrent dans Les Simpsons, l’iconique série d’animation. Cette vieille dame complètement tarée à l’allure négligée qui vit avec d’innombrables chats dans une maison insalubre. Le 13e épisode de la saison 18 décrit son parcours : de petite fille, puis étudiante, à avocate brillante, elle finit par se faire virer, sombre dans l’alcool, et ne parle désormais que de manière incompréhensible. Isolée, elle adopte en série des chats qu’elle lance souvent au visage de ses interlocuteurs.
Dans le monde anglo-saxon, les femmes à chats ont régulièrement été perçues comme des vieilles filles. Plus récemment, cette notion est associée aux femmes très investies dans leur carrière et peu disponibles pour n’importe quelle relation amoureuse.
Un stéréotype aux origines variées
Le cliché de la «femme à chat», ou, plus cruel encore dans sa version anglophone, de «crazy cat lady» («la folle femme à chat») est une façon de désigner une femme, généralement célibataire et caractérisée par l’affection exclusive envers ses chats, omniprésente dans le langage collectif et nos références culturelles. Ce stéréotype est le plus souvent employé de façon péjorative.
Si il y a, bien sûr, cette espèce de légende urbaine de la vieille fille morte seule dans son appartement dont les chats affamés ont fini par se nourrir de sa chair et de ses globes oculaires (et cela est, en effet, arrivé à une quinquagénaire britannique), en ce qui concerne la «femme à chats», il s’agirait au départ de personnes recueillant compulsivement des animaux et vivant avec eux dans un espace restreint. Une étude de la psychologue Jennifer Patterson publiée dans Psychology Today conclut que les gens qui possèdent beaucoup d’animaux de compagnie les utilisent comme substituts aux relations humaines.
Aux États-Unis, les conservateurs utilisent ce stéréotype pour décrédibiliser les combats féministes
Depuis les révélations du site Politico, sur la possible suppression de l’arrêt Roe vs Wade qui garant le droit à la l’IVG, deux politiciens conservateurs usent du terme « femmes à chats » pour délégitimer le combat de sauvegarde du droit à l’avortement aux États-Unis.
Sarah Jones, journaliste, dans les colonnes de Courrier International : « c’est un vieux stéréotype fondé sur des croyances stupides au sujet des femmes célibataires et des féministes. Associés aux femmes et à la ‘sphère domestique’, les chats étaient utilisés dans des images antiféministes pour dépeindre les suffragettes comme idiotes, puériles, inaptes à la vie politique ».
En effet, à l’origine, le chat était un symbole des militantes du 20ème siècle qui se sont battues pour défendre le droit de vote des femmes. Problème, l’image de cet animal a vite discrédité la cause des suffragettes. Les chats domestiques étaient associés au foyer où les femmes devaient rester et les chats errants représentaient les féministes hystériques.
Des données historiques et statistiques
La narration autour de l’expression «femme à chat» et l’équation femme + félin, repose aussi sur plusieurs données historiques et statistiques. D’abord, il est vrai qu’il existe un tropisme féminin pour les chats. Une étude menée par l’American Pet Products Association sur 463 propriétaires de chat révélait que 80% d’entre eux étaient des femmes. D’autres enquêtes ont révélé que les femmes avaient un rapport «plus intense» avec leurs chats que les hommes et entretenaient davantage d’interactions avec eux.
L’expression est aussi utilisée pour désigner les personnes souffrant du syndrome de Noé quand elles accueillent un nombre élevé de chats sans toutefois s’en occuper de façon appropriée. Il est vrai aussi que le syndrome de Noé, pathologie consistant à héberger trop d’animaux de compagnies touche particulièrement les femmes, spécifiquement quand elles sont seules et âgées.
L’association vieille + fille + chat trouve enfin ses sources dans l’histoire et la démographie. D’abord, les femmes vivent plus longtemps que les hommes (un écart de 6 ans en France) et se retrouvent donc davantage confrontées au veuvage et à la solitude pouvant mener à la volonté de s’entourer d’animaux de compagnie. Et cela peut expliquer en partie la prépondérance de femmes parmi les victimes du syndrome de Noé.
Aux troubles psychiatriques
En 2012, certaines recherches avancent que le parasite Toxoplasma gondii, qui se reproduit exclusivement dans les chats, peut causer des troubles psychiatriques, dont le trouble obsessionnel compulsif (TOC). La syllogomanie (accumulation compulsive) de chats est régulièrement associée aux femmes dépendantes des chats. Des médias ont mis en avant l’expression « Crazy Cat Lady Syndrome » (« Syndrome de la femme à chats folle ») pour indiquer une toxoplasmose (faisant implicitement un lien entre T. gondii et des troubles psychiatriques).
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